L’art haïtien a toujours été un puissant reflet de l’âme du pays. Peintres, musiciens, écrivains et acteurs ont, au fil des générations, porté haut les couleurs de la culture haïtienne, malgré les crises et l’instabilité. Pourtant, aujourd’hui, les artistes haïtiens se retrouvent dans une situation critique. Entre insécurité grandissante, absence de soutien institutionnel et manque d’infrastructures adaptées, ils sont nombreux à lutter pour leur survie dans un pays qui, paradoxalement, puise une partie de son identité dans leur créativité.
L’insécurité qui gangrène le pays n’épargne pas les artistes. Nombreux sont ceux qui vivent sous la menace des gangs, contraints de s’exiler ou d’abandonner leur passion pour assurer leur propre sécurité. Les salles de spectacle ferment, les galeries d’art se vident, et les événements culturels deviennent rares, faute de conditions adéquates pour garantir la protection du public et des créateurs.
Cette situation plonge les artistes dans un profond désarroi. Beaucoup se retrouvent privés de moyens de subsistance, incapables de se produire ou de vendre leurs œuvres. Le marché de l’art, déjà fragile, s’effondre encore plus face à l’incertitude économique et à la peur qui règne dans les rues.
Malgré leur rôle essentiel dans la préservation et la diffusion du patrimoine culturel haïtien, les artistes ne bénéficient d’aucune véritable politique de soutien. L’État haïtien reste largement absent en matière de subventions, de protection sociale et de promotion de la culture. Les rares initiatives existantes sont souvent mal gérées ou inefficaces face aux défis colossaux du secteur.
Les infrastructures culturelles, elles aussi, sont en piteux état. Les musées, théâtres et centres artistiques souffrent d’un manque d’entretien et de financement, rendant l’accès à l’art encore plus difficile pour la population. Dans un pays où l’art a longtemps été un espace de résistance et d’expression face à l’oppression, cette négligence institutionnelle équivaut à un abandon pur et simple.
Face à cette réalité, de nombreux artistes choisissent l’exil, cherchant à poursuivre leur carrière dans des pays où leur talent est mieux reconnu et valorisé. Mais ceux qui restent font preuve d’une résilience admirable. À travers les rues de Port-au-Prince et d’autres villes, on trouve encore des peintres qui exposent leurs toiles sur les trottoirs, des musiciens qui animent les quartiers malgré les difficultés, et des écrivains qui continuent à raconter l’histoire d’Haïti, coûte que coûte.
Cette force de caractère mérite d’être accompagnée par des actions concrètes. Il est urgent que l’État, ainsi que les acteurs privés et internationaux, s’engagent en faveur des artistes haïtiens. Un pays sans culture est un pays sans âme. Haïti ne peut se permettre de perdre ses créateurs, ces derniers étant non seulement des ambassadeurs de son identité, mais aussi des témoins et des acteurs de son histoire.
Soutenir l’art, c’est investir dans l’avenir du pays. Il est temps que les autorités prennent conscience de cette vérité et accordent aux artistes haïtiens la place qu’ils méritent dans la reconstruction de la nation.
Kenson Oreste est né à Lamardelle, commune de Ganthier. Il est un jeune journaliste rédacteur haïtien. Il est passionné de la lecture et de l’écriture.